LaManchure planifie son expansion et augmente sa production

NOTRE-DAME-DU-MONT-CARMEL. Fondé en 2016, l’atelier de fabrication de couteaux de cuisine LaManchure de Notre-Dame-du-Mont-Carmel continue de gagner en popularité, si bien qu’elle entrevoit un important développement pour 2024.

Depuis la création de LaManchure, la demande pour ses couteaux haut de gamme connaît une croissance soutenue ce qui a permis au coutelier Etienne Therrien d’acquérir rapidité et efficacité au niveau de la production.

« Mes méthodes de travail, c’est toujours dans l’optique artisanale, mais c’est sûr que j’ai pris de l’expérience. On perd beaucoup moins de temps à la production. On fait plus d’étapes en série: au lieu de faire seulement un couteau à la fois, maintenant on en fait six ou sept en même temps. Mais la demande est toujours grandissante, donc les délais d’attente sont de plus en plus longs. »

Etienne a imaginé une nouvelle série de couteaux, la série Natif, dont la confection a été réfléchie pour être plus optimale.

« C’est une lame du Québec et on utilise du chêne du Québec qu’on vient  »éboniser ». On est fier de fabriquer une lame entièrement québécoise. Notre nouvelle série va nous aider à produire plus rapidement et à avoir un plus grand inventaire. »

Afin d’augmenter la cadence de production, certaines étapes sont confiées à des sous-traitants.

« Encore là, tout va être fait ici au Québec, c’est très important pour nous. On aime ça encourager les autres entreprises qui sont déjà installées pour la fabrication de cette fameuse lame-là. Acheter des équipements, ce n’est pas nécessairement la méthode qu’on vise. Il y a des entreprises qui ont déjà des employés. »

C’est le cas pour le traitement de l’acier qui se fait à Montréal. L’acier est la seule matière première qui provient de l’Allemagne.

« On n’a pas vraiment le choix. Mais je ne fais pas tailler là-bas, même si ce serait plus simple au niveau du transport. Tout le travail est fait ici, au Québec. C’est ça qu’on veut. L’étape de trempage, un traitement thermique, est fait dans des fours sous vide. On n’est pas outillé pour le faire: on les envoie principalement tremper dans une usine qui a une qualité certifiée. On a une dureté entre 61 et 63 Rockwell C sur nos lames. Ça nous permet de nous classer mieux que le haut de gamme, qui est 57 Rockwell C. C’est vraiment très dur. Ce sont des lames très résistantes qui ne vont pas plier. »

Quelques modèles de couteaux produits à Notre-Dame-du-Mont-Carmel. (Photo courtoisie)

Passer à la vitesse supérieure

Pour que l’entreprise poursuive et accélère son développement, elle a élaboré cette nouvelle chaîne de production qui implique des techniques différentes.

« Notre cadence était d’environ 150 ou 175 lames par année. On vise 500 lames pour cette année, avec une nouvelle façon de procéder. Avant on fabriquait la lame et on fabriquait le manche par-dessus. Maintenant, on peut fabriquer la lame et le manche à part, et on vient assembler ces deux éléments-là. »

La série de couteaux qui a fait la renommée de l’atelier, quoique plus longue à produire, restera disponible.

« La série Prestige va encore exister comme ça. On vient de rajouter la nouvelle série Natif qui va nous aider à produire plus vite puisqu’on l’assemble avec des rivets mécaniques vissés. »

La disponibilité des produits doit tendre à répondre la demande pour que LaManchure puisse se développer. Afin d’augmenter le volume de production, l’entreprise s’est vu octroyer des subventions de 7 500 $ et des prêts de plus de 37 000 $ de la MRC Des Chenaux pour soutenir son expansion.

« J’ai un bon associé qui est là à temps partiel. On est en train de regarder pour engager parce qu’on va avoir besoin d’un coup de main. On vise de produire plus en quantité parce qu’on a trois mois et demi de délai d’attente. On veut diminuer ça. »

Un marché niché

La clientèle de LaManchure se compose surtout de gens qui aiment cuisiner et qui réalisent que pour bien s’équiper, il faut parfois y mettre le prix.

« Les gens comprennent maintenant c’est quoi une bonne lame. En Europe, en France, il y a des boutiques de coutellerie, il y a des couteliers, mais ici c’est très rare. Ce ne sont pas des valeurs qui nous ont été inculquées. On est prêt à s’acheter des souliers de marathonien à 400 $ pour aller faire de la randonnée, mais pour un couteau, dès qu’on a payé 50 $, on pense qu’on a un bon couteau. Il y en a qui me disent: »Je ne suis pas un grand chef », mais ici tu achètes un couteau et tu vas le garder toute ta vie. C’est une question de mentalité. »

C’est d’ailleurs en voulant se procurer un couteau de qualité il y a plusieurs années qu’Etienne a eu l’idée de fonder son propre atelier.

« En 2016, j’avais un budget de 350 $ pour m’acheter un bon couteau. Celui que je voulais, un couteau très standard, était à 800 $, puis en plus il rouillait! Je me suis mis à m’intéresser à ça parce que je faisais déjà des couteaux forgés, des couteaux de chasse, mais un couteau de cuisine, je n’avais jamais pensé à ça. Je cherchais le meilleur acier inoxydable possible. Je me suis tourné vers le fameux acier allemand qui est, à mon sens, l’acier inoxydable le plus performant au monde. On a bâti l’entreprise sur ce fameux acier-là. S’il y en avait un autre plus performant, c’est ça que j’aurais ici. »

Personnaliser son couteau

LaManchure a sa boutique en ligne, mais les clients peuvent se rendre à l’atelier, sur rendez-vous.

« C’est très simple, l’atelier, mais les gens sont curieux. Des gens partent de Sherbrooke et de Rivière-du-Loup pour venir chercher leur couteau. Ils peuvent choisir les essences de bois, ils vont faire personnaliser leur lame avec un logo, leur nom de famille. »

Etienne est fier de l’évolution de l’atelier et de l’avenir qu’il entrevoit devant lui.

« Plus ça va, plus notre finition s’améliore. On souhaite que dans dix ans, ce sera encore plus près de la perfection. Il va toujours rester une touche artisanale derrière ça. On sait qu’on a des bons prix et c’est ça qu’on visait. On veut prouver ce qu’on est capable de faire ici, puis ça va être assurément le produit qui va parler de lui-même. On en est fiers. »

Lorsque la production aura atteint son rythme de croisière, d’autres projets pourront prendre leur envol.

« On va avoir des formations d’aiguisage avec des grands chefs. Nos couteaux commencent à être vus. On a eu plusieurs offres, mais on se tenait tranquille tout simplement parce qu’on avait peur que ce soit un coup d’épée dans l’eau, un coup de couteau dans l’eau! Mais là, on va se tenir prêt. Quand on va atteindre un certain inventaire, on sera prêt à faire une certaine sortie. »