Menaces d’une taxe de 25% de Trump: les entreprises misant sur la faiblesse du dollar sont à risque
ÉCONOMIE. La menace de Donald Trump d’imposer une taxe de 25% sur tous les produits exportés aux États-Unis fera mal en premier lieu aux manufacturiers dont le seul avantage est la faiblesse du dollar canadien.
C’est du moins l’avis de Dany Caron, président des Manufacturiers Mauricie / Centre-du-Québec (MMCQ). « Au Québec, il y a environ 25% des entreprises manufacturières dont le seul avantage concurrentiel est le taux de change. Actuellement, notre dollar canadien vaut 30% de moins que le dollar américain. Admettons que demain, les Américains doivent payer 25% de plus, l’écart ne sera plus suffisant pour justifier l’achat au Québec. Pour une entreprise dont l’exportation représente 50% du volume d’affaires, elle va plier les genoux », estime le président de Portes Baril à Victoriaville.
« Pour eux, c’est du cheap labor, donc il n’y aura plus d’avantages à transiger avec ces entreprises. C’est la même affaire qu’on faisait avec la Chine. Si la seule raison d’acheter en Chine, ce n’est pas la qualité du produit, c’est le prix. Alors, pour ces entreprises qui font partie du 25%, je confirme qu’ils stressent actuellement. »
À l’inverse, l’entrepreneur ne voit pas de vent de panique chez les 75% des entreprises restantes. « Celles-là, le taux de change les aide, mais elles se démarquent avant tout avec un produit ou un service qu’on ne retrouve pas aux États-Unis. Alors si demain on se retrouve avec un dollar canadien à parité avec le dollar américain à cause de la taxe de 25%, elles vont continuer à exporter parce que les Américains achètent une expertise et non pas un prix. Ça a été le cas au début des années 2010 quand la piastre canadienne était even avec la piastre américaine, poursuit le président des MMCQ.
Dany Caron souligne qu’au moment où on demande aux manufacturiers de se moderniser et d’être plus efficaces, cette menace d’un tarif de 25% imposé par le nouveau président américain peut s’avérer une opportunité. « Ces entreprises sont déjà dans un processus d’amélioration pour que leur prix de revient soit mieux structuré. Il faut qu’elles continuent et dans l’hypothèse que les États-Unis n’imposent pas la taxe de 25%, elles vont juste être plus profitables », ajoute-t-il.
Dany Caron endosse la stratégie de Québec et Ottawa de répondre aux Américains par des mesures similaires si Trump va de l’avant. « Je pense qu’il faut se montrer droit et être capable de répliquer. Au Québec, on a des minéraux rares qu’on exporte aux États-Unis pour la fabrication de batteries. Plus de 60% de notre aluminium est exporté là-bas parce qu’ils ne sont pas capables d’en produire. Je pense qu’on a un poids suffisamment élevé pour être capable de négocier », soutient le président des MMCQ.
Dany Caron entretient cependant des craintes pour l’industrie forestière et la gestion de l’offre agricole qui feront peut-être partie des éléments de marchandage lors de futures négociations. « Ultimement, si Trump va de l’avant avec sa taxe de 25%, je pense que la pression pour le faire reculer va beaucoup venir de l’interne que celle qu’on pourrait imposer comme canadien. Quand je parle aux manufacturiers de la région, ils pensent majoritairement que ce sont leurs clients américains qui vont mettre la pression sur le président pour calmer le jeu », conclut-il.