Centrale La Gabelle: 100 ans et encore pleine d’énergie!
NOTRE-DAME-DU-MONT-CARMEL. Difficile d’imaginer aujourd’hui un chantier pharaonesque mené aussi rondement que celui de la Centrale La Gabelle qui célèbre ses 100 ans en 2024.
Du premier batardeau installé à l’automne 1922 pour faire dévier le cours de la rivière Saint-Maurice du côté de Saint-Étienne-des-Grès, les quatre premiers groupes turbine-alternateur de la centrale seront activés dès avril 1924, soit 17 mois après le début du chantier, alors que l’échéancier prévoyait une mise en service le 1er février 1925.
« C’est exceptionnel comme délai de réalisation! C’est un des temps les plus rapides versus le volume de la centrale », souligne Mireille Campagne, conseillère Expertise en environnement chez Hydro-Québec.
Au cours des premiers mois, ce sont près de 1500 ouvriers qui s’affairaient sur le chantier qui tournait sept jours sur sept, 24 heures sur 24. Au plus fort des travaux, jusqu’à 30 wagons de marchandise se rendaient chaque jour sur le site.
Filiale de la Shawinigan Water & Power (SW&P), c’est la Saint-Maurice Power Compagny qui pilote le chantier. Pour loger les centaines d’ouvriers, elle construit des structures temporaires et simplement meublées à proximité de la future centrale. Les ouvriers de La Gabelle disposent d’un espace multifonction comportant un restaurant, un salon de barbier et une salle de billard, et un lieu où faire leur lessive. Le campement sera démantelé en 1925, après la fin des travaux.
« C’était des gens qui venaient de partout, autant des anglophones que des francophones. Avec la voie ferrée qui se rendait jusqu’au chantier, plusieurs travailleurs arrivaient de Montréal. Il y avait une effervescence, car les ouvriers étaient bien payés avec de bonnes conditions et juste à côté, on retrouvait Shawinigan, une jeune ville industrielle en plein développement avec beaucoup de logements neufs », poursuit Mickaël Lapalme, coordonnateur des tours guidés chez Hydro-Québec.
Avec sa façade en briques, la Centrale La Gabelle se voulait une belle carte de visite pour la SW&P. « Il y a 100 ans, l’électricité n’était pas un monopole et il y avait plusieurs petites compagnies pionnières. C’est pourquoi elles construisaient des centrales monumentales comme celle-ci pour le prestige qu’elles voulaient montrer en vue d’attirer les clients et les investisseurs », souligne Mireille Campagna. La fière allure de La Gabelle fut d’ailleurs reconnue d’une certaine manière quand Postes Canada lui consacra un timbre en 1946.
Ce qu’il y a de remarquable dans cette installation – et comme d’autres comme Shawinigan 2 construite en 1911 – c’est que les équipements et le procédé pour produire de l’électricité y sont somme toute les mêmes qu’il y a 100 ans.
En 1924, La Gabelle peut miser sur quatre groupes turbine-alternateur pour la production d’énergie. Un cinquième groupe est ajouté en 1931. Aujourd’hui, la puissance installée de la centrale est de 131 MW. (Photo Hydro-Québec)
Comme une voiture antique
« Il y a eu de la maintenance à faire dans les groupes-alternateurs, mais la production brute d’électricité n’a pas changé. C’est comme une voiture antique, ça fonctionne bien, mais il y a de la maintenance à faire pour éviter d’avoir une mauvaise surprise », explique Denis Bérubé, chef Opérations et maintenance pour les centrales du Bas-Saint-Maurice chez Hydro-Québec.
À La Gabelle, des travaux majeurs ont été réalisés à quelques reprises, comme dans les années 1930 où on installe un 5e groupe turbine-alternateur pour porter sa puissance à 130 MW qu’elle affiche encore aujourd’hui. Dans les années 1970, alors propriété d’Hydro-Québec, la passe à billes, qui permettait aux pitounes de bois de dériver jusqu’à l’embouchure de la rivière Saint-Maurice à Cap-de-la-Madeleine, cesse d’être utilisée et sera définitivement obstruée en 1998.
C’est aussi à la même époque qu’Hydro-Québec construit le lien interrives longeant la crête du barrage afin de permettre aux automobilistes et cyclistes de traverser la rivière. Aujourd’hui, le passage est utilisé en moyenne par près de 1000 automobilistes quotidiennement.
« Dans une installation centenaire comme celle-là, le principal défi pour Hydro-Québec, c’est de maintenir les opérations en contrôlant la dégradation des équipements avec des réfections faites au bon moment. Ici à La Gabelle, on a des machines qui, au niveau mécanique, ont parcouru le temps », termine fièrement Denis Bérubé, toujours fasciné par le savoir-faire déployé par les ingénieurs à l’époque.
Portes ouvertes le 28 septembre
Dans le cadre des 100 ans de la Centrale La Gabelle, les citoyens de Saint-Étienne-des-Grès et de Notre-Dame-du-Mont-Carmel sont invités exceptionnellement à une visite guidée des installations ce samedi 28 septembre, entre 8h et 16h. Dans le parc du côté de Notre-Dame-du-Mont-Carmel, un kiosque accueillera les personnes intéressées à partager leurs souvenirs de La Gabelle.
Le public est invité à venir montrer leurs photos et leurs objets et à raconter leurs plus belles anecdotes reliées à cet équipement centenaire. En soirée à compter de 19h, dans le stationnement du parc de La Gabelle, du côté de Saint-Étienne-des-Grès, de l’animation est prévue avec Antan Présent (contes et légendes), Guy Brière et ses musiciens, et pour clôturer la soirée, la musique des Frères Lemay.