TES déposerait des demandes à la CPTAQ sans l’autorisation des propriétaires

L’apiculteur d’Hérouxville Éric Bouchard de la Ferme Parcelles de soleil s’est dit surpris de voir que son nom figurait sur une liste de propriétaires qui auraient donné l’autorisation à TES Canada de faire une demande de dézonage en leur nom. Mercredi soir à la séance du conseil des maires de la MRC de Mékinac, il est venu demander aux différentes Municipalités de valider le consentement des propriétaires visés.

Des Municipalités des MRC de Mékinac et des Chenaux ont récemment été sollicitées par TES pour adopter des résolutions d’appui à sa demande qui sera faite dans les prochains mois auprès de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ). Dans les documents accompagnant le modèle-type de résolution à adopter fourni par TES, des propriétaires dont le nom est mentionné n’auraient pas été mis au courant d’une telle demande et encore moins qu’ils autorisaient TES à la faire.

“Allez-vous vérifier les noms qu’il y a sur la liste, si ces gens-là ont autorisé TES à faire une demande en leur nom?”, a d’abord demandé Éric Bouchard en s’avançant au lutrin à la période de questions. “Moi, je suis sur la liste. Je n’ai jamais autorisé TES à venir chez moi. Je n’ai jamais autorisé TES à faire une demande à la CPTAQ. Je vous demande de vérifier si ces gens-là ont bien autorisé TES à faire une demande en leur nom.”

Dans le cadre de l’étude d’impact sur l’environnement que TES devait réaliser, des propriétaires ont eu à donner l’autorisation à des techniciens de se rendre sur leur terrain pour des observations. C’est le cas de M. Bouchard, qui a refusé.

“Ils sont venus chez moi pour ça. Ils te lisent le contrat. C’est pressant de demander: à quel nom je fais le chèque. J’ai dit non. Je veux avoir le contrat. Je veux le lire.”

M. Bouchard raconte que le contrat était flou et laissait place à trop de latitude. Il considérait également que la localisation de son terrain n’était pas la plus appropriée pour les tests de son qu’auraient voulu effectuer TES.

“Il est revenu deux semaines après. Mais c’était autre chose. Il venait voir la grosseur de mes arbres, l’âge de mes arbres, les espèces. Je me doutais bien que c’était pour les fils, parce que je savais que la demande était faite pour en face de chez moi. Mon voisin s’est fait offrir 170 000 $ sur 20 ans pour passer des fils sur son terrain. Je ne sais pas quelle grosseur ça a, c’est trois méga-fils. Mais sur le contrat, c’est bien indiqué qu’ils ne sont pas responsables des tensions parasites. Ça, c’est inquiétant.”

Le terrain de M. Bouchard a toutes les raisons de se trouver dans la mire de TES.

“Les fils arrivent chez moi. D’un côté, c’est des marécages où ils ne peuvent pas passer. De l’autre bord, c’est une montagne. Ils n’iront pas dynamiter pour passer des fils. La ligne droite est la plus simple, c’était chez nous.”

Il pense qu’il pourrait éventuellement subir de la pression de la part de l’entreprise.

“La journée que la CPTAQ l’autorise, ils vont venir me voir. Si un montant c’est pas assez, ils vont donner plus. Parce que la facilité est là.”

Selon M. Bouchard, des propriétaires qui s’estiment lésés pourraient se regrouper pour défendre leur droit à la propriété.

“Pour l’instant, je laisse aller les choses. On va voir quand la demande de TES va être faite à la CPTAQ si mon nom est encore là. Ils vont peut-être se rendre compte avant que je ne l’ai pas autorisé. Je pense qu’il y a une demande collective qui va être faite pour tous ceux qui n’ont pas autorisé TES à faire cette demande-là. TES Canada va être mise en demeure là-dessus parce qu’ils n’ont pas d’affaire à faire ça.”

M. Bouchard siège comme administrateur au Syndicat de l’UPA de Mékinac.

“On va avoir une réunion la semaine prochaine. C’est sûr que j’amène ça pour dire qu’il il y a une problématique.”

Entre-temps, il demande aux Municipalités de contre-vérifier les prétendues autorisations des propriétaires.

“Je pense que c’est leur premier devoir de le faire.”

Solifor aussi concernée

Après l’intervention de M. Bouchard durant la période de questions, une porte-parole de Toujours maître chez nous, Carole Neill, a ajouté que la société de gestion d’actifs forestiers Solifor vivait la même situation que le citoyen d’Hérouxville, comme si elle avait autorisé que TES fasse une demande à sa CPTAQ pour certains de ses lots.

“J’ai communiqué avec le directeur général de Solifor qui m’a dit qu’il allait communiquer avec TES Canada pour que TES inscrive dans sa demande auprès de la CPTAQ qu’ils n’ont pas l’autorisation de l’organisation. Même si dans la résolution on lit que tous les lots concernés ont eu l’autorisation du propriétaire, c’est faux. Ils sont supposés écrire dans la demande déposée à la CPTAQ que les lots n’ont pas obtenu l’autorisation.”

Réaction de TES

Jeudi après-midi, TES a réagi au cas de M. Bouchard en affirmant que tous les propriétaires concernés ont été informés.

“Les lots du propriétaire sont situés à proximité du tracé du collecteur souterrain mais ne sont pas directement concernés par le projet. Comme cette personne ne recevrait pas d’infrastructure du projet, elle n’a pas été contactée. Dans une volonté de rigueur et de transparence, nous avons transmis aux Municipalités des cartes et des listes de lots préliminaires comprenant les lots directement concernés, mais aussi ceux situés à proximité, afin de s’assurer que l’ensemble des lots potentiellement impactés soient étudiés, d’éviter toute erreur de tracé ou omission et d’assurer une conformité complète du projet aux exigences de la CPTAQ.”

L’entreprise conclut en assurant que seuls les lots visés pour lesquels les propriétaires ont donné leur accord seront inclus dans la demande déposée à la CPTAQ.