De serveuse à brasseuse
SAINT-STANISLAS. Quand Francis Boisvert, copropriétaire de la Microbrasserie Le Presbytère, lui a demandé d’aller le voir avant son quart de travail, Jessica Ricard s’est demandé qu’elle erreur elle avait commise. Nouvellement serveuse dans cet endroit qu’elle affectionne depuis le tout début, elle était un peu nerveuse à l’idée de cette rencontre. Elle a finalement été bien surprise lorsque son patron lui a offert d’apprendre, à ses côtés, le métier de brasseur.
Depuis ce jour, elle se passionne pour ce travail. Elle est d’ailleurs l’une des seules femmes au Québec à exercer le métier de brasseuse.
« Ça va faire un an en mai que je travaille ici, lance-t-elle d’emblée. J’étais cliente depuis longtemps. J’adore la place. Auparavant, j’ai travaillé pendant 25 ans comme serveuse-cuisinière pour ma mère et ma tante qui étaient propriétaires du Gros Hot-Dog dans le secteur Saint-Louis-de-France, à Trois-Rivières. Elles ont vendu tout juste avant l’arrivée de la pandémie et le premier C.V. que je suis venue porter après, c’est ici. »
C’était en août 2020. À ce moment, les propriétaires de la microbrasserie n’avaient pas besoin de serveuse. « Plus tard, en avril 2021, je viens manger ici, raconte Jessica. Je me mets à parler avec Linda, la gérante, et elle me propose un emploi. J’ai commencé comme ça. »
Chaque fois qu’elle avait à se rendre à l’étage pour servir des clients, elle passait devant les installations de la microbrasserie en y jetant un coup d’oeil. Curieuse, elle posait beaucoup de questions au maître-brasseur, Francis Boisvert.
« J’adore les microbrasseries, dit-elle. J’étais tellement curieuse de voir comment ça fonctionne. Je posais plein de questions à Francis. Le troisième soir que je suis entrée travailler, Francis m’a dit d’aller le voir en haut avant de commencer. Je me suis repassé en tête mes autres quarts de travail. Je n’avais pas fait d’erreurs. J’étais bien trop heureuse et allumée de travailler ici. Je me demandais vraiment pourquoi il voulait me voir. »
Eh bien, c’est parce que Francis l’a observée travailler. Il a remarqué qu’elle était une amatrice de bières et qu’elle avait une belle curiosité sur le sujet. « Il m’a demandé si ça me tentait d’apprendre le métier de brasseur, se souvient Jessica. Honnêtement, je n’y avais jamais pensé. Je lui ai dit que j’y réfléchirais. J’étais tellement surprise par son offre. J’adore la bière, mais je ne savais pas si j’allais aimer en faire. »
« C’était le vendredi 4 juin. Je me souviens encore de la date, lance Jessica en riant. Le lendemain matin, je lui envoyais un texto pour savoir quand il allait brasser la prochaine fois. Il m’a dit lundi matin, 7h30. Parfait. »
Une première brasse
Le lundi matin à 7h30, Jessica était en poste. « Et j’ai ca-po-té! C’est dur pour moi d’expliquer ce qui me fait autant triper. C’est l’ensemble. Les odeurs, tout le travail derrière le produit, la création. C’est tout ça », répond-elle simplement.
Le métier de brasseur requiert à la fois des compétences physiques et mentales. Il y a des calculs et de la chimie derrière chaque recette. Il faut également avoir la force nécessaire pour transporter les grains et brasser la bière.
« Au début, j’étais raquée de partout, relate Jessica. Le 7 juin 2021, c’était la journée de ma première brasse. Il faisait 40 avec l’humidex. Francis m’a dit que si je passais à travers de cette journée, je serais bonne à l’année. »
Présentement, elle est brasseuse deux jours par semaine et serveuse deux soirs par semaine.
« Comme serveuse, j’étais déjà sur mon X. Et là, en plus de tout ça, j’ai une nouvelle passion pour la fabrication de bières. Je suis choyée, confie-t-elle. Je me retrouve ici dans un endroit que j’adore avec des patrons incroyables et une équipe de fou. Je me sens comme chez moi ici. Francis me fait confiance et me donne toute la liberté que je veux. »
En plus de ça, les deux brasseurs écoutent la même musique. Si c’était tranquille lors de l’entrevue, Jessica assure qu’en temps normal, on entend du métal jouer au fond. Il n’y a pas seulement Jessica et Francis qui brassent au Presbytère. La musique aussi!
Fait intéressant : lors du passage de L’Hebdo Mékinac/des Chenaux, Jessica brassait la bière qu’elle a créée. C’est sa toute première recette, la Michel Ange, une blonde qui est d’ailleurs sur le menu. « Servir sa bière, c’est spécial. Je suis fière de ça », conclut-elle.
Une journée bien remplie
Lors des journées de brasse, Jessica arrive à la microbrasserie à 7h45. Maman de trois enfants, à 7h10, tout le monde sort de la maison. Les deux grands partent en autobus et elle dépose la petite à la garderie.
À son arrivée, l’eau est déjà chaude et les grains sont moulus de la veille. En arrivant, elle prend pH de l’eau et l’équilibre avec les minéraux. Après, c’est la brasse. À 8h10, elle doit brasser pendant environ 20 minutes.
Ensuite, il y a une circulation à faire pendant une heure environ pour aller chercher le plus de sucre possible dans la céréale. Après, c’est le transfert et l’ébullition. Rendu là, tout va très vite. Il faut être minutieux et concentré. En dernier, la bière va au fermenteur. Généralement, la journée de brasse se finit vers 15h.